Que faire des nouveaux mots de la langue française en tant que plume?
Vaste sujet qui touche directement à nos convictions propres.
En début de semaine, Le Figaro nous rapportait que le nouveau Petit Larousse édition 2025, qui s’apprête à fêter ses 120 ans, intégrait 150 nouveaux mots, sens, locutions et expressions.
Parmi ceux-ci : cyberterrorisme, mégabassine, empouvoirement, platisme, visibiliser, désanonymiser, écogeste, verdir...
Mais s’ils sont désormais dans le dictionnaire, faut-il nécessairement les utiliser dans nos discours ou tribunes ?
Il me semble que la réponse à donner n’est pas si aisée.
D’abord, parce que certains nouveaux mots, à mes yeux, semblent être bien ancrés dans le langage courant, quand d’autres détonnent encore.
Ainsi, les mots « cyberterrorisme » ou « cyberattaque » sont pour moi largement admis tant ils reflètent des menaces très concrètes pour nos entreprises et nos institutions depuis de nombreuses années maintenant.
J’aurais en revanche plus de mal à écrire un mot comme « empouvoirement », qui, pour moi, n’est que très peu utilisé encore et qui, surtout, est une traduction forcée de l’anglais « empowerment ».
Le mot « visibiliser » fait aussi son apparition cette année. Il est vrai qu’il est de plus en plus utilisé. Mais « rendre visible », « faire connaître », cela existe non ? Pourquoi faudrait-il inventer un nouveau mot ?
Bien sûr qu’une langue évolue, qu’elle épouse au fur et à mesure les évolutions d’une société et ses inquiétudes.
L’idée n’est pas d’être ringard, de s’exprimer comme au Moyen-Age mais parfois, posons-nous simplement la question de savoir si nous n’embrassons pas trop rapidement des influences étrangères et des causes, à tel point qu’on en vient à modifier notre vocabulaire ?
Autre exemple frappant : à l’heure où nos agriculteurs souffrent et auraient besoin d’un soutien infaillible de la population, quel signal envoie-t-on en intégrant le mot « agrotoxique » dans le dictionnaire ? Comme si la toxicité de notre agriculture était devenue une norme, un fait établi. Nous savons pourtant que notre agriculture est, très certainement, la plus respectueuse au monde de l’environnement.
La même édition du Figaro nous proposait un récit passionnant de Guillaume Perrault sur l’évolution des pratiques de lecture dans notre pays. Le journaliste rapportait les propos d’un éminent professeur de la Sorbonne, Charles Seignobos, qui estimait en 1933 : « La langue courante s’est altérée, surtout à Paris, sous l’action des articles de journaux écrits à la hâte et par l’adoption de termes de la langue administrative et des expressions barbares ou étrangères employées dans la publicité commerciale. » Déjà !
Pour conclure, gardons-nous simplement, dans nos écrits, de ne pas céder, parfois, aux injonctions et vacarmes de notre époque, et d’emprunter ce que nous lègue déjà les illustres auteurs de notre littérature.