7 leçons à mettre en place dans nos écrits par Bernard Pivot
Il était déjà devenu depuis de nombreuses années une légende de la littérature tant il a pu faire, dans sa carrière, pour promouvoir et défendre le livre et la langue française, avec une conviction qui lui était chère, les rendre populaires.
Depuis hier et l'annonce de sa disparition, une pluie d'hommages à son égard retentit légitimement.
Pour ma part, je retiendrai les 7 leçons suivantes à garder en mémoire quand on écrit:
Allez à l’essentiel
Bernard Pivot était un as de Twitter. Il écrivait ceci à propos de son utilisation:
“C’est à la fois l’exercice mental et l’exercice de style. C’est-à-dire arriver à résumer une pensée, un souvenir, un fait, un sentiment en 140 signes. Ce qui suppose donc de faire un effort pour exprimer de la manière la plus claire, et si possible avec humour, ce que l’on veut dire.” […] “Un tweet vous oblige à aller à l’essentiel, sans fioritures, sans propositions subordonnées. On n’a pas le temps de mettre des ‘cependant’, des ‘quoi que’.”
Exercez-vous à écrire comme sur Twitter, dans sa première version où les textes étaient limités à 140 signes.
Jouez avec les mots
Bernard Pivot était un grand gourmand de la vie comme des mots, lesquels revêtaient pour lui mille saveurs. Il se plaisait notamment à manipuler les noms de famille pour en faire des verbes.
“Cahuzaquer: verbe irrégulier. Def: jurer les yeux dans les yeux. Ex: il m’a cahuzaqué qu’il m’aimerait toute sa vie.”
Ne vous privez pas de jouer avec les mots, avec la syntaxe, avec les figures de style que nous propose notre langue, à conditions que cela soit fin et accessible.
Ecrivez à la main
Pour Bernard Pivot, comme pour tant d’autres auteurs, écrire à la main avant de taper sur le clavier de nos outils numériques, permet une meilleure concentration et application.
“J’écris à la main. Je me suis aperçu que j’écris mieux ainsi que sur mon ordinateur. J’ai des stylos à plume jetables. J’adore raturer et aussi annoter les ouvrages. Je suis aussi fan des notes de bas de page.”
Accordez de l’importance à la ponctuation
La ponctuation provoque le rythme de votre texte. Lui accorder de l’importance, c’est permettre à votre récit d’être entendu comme une mélodie. Bernard Pivot explique avoir par exemple une affection particulière pour le point virgule.
“Le point virgule rend service pour les phrases trop longues et les énumérations. C’est une halte plus longue que la virgule et je le trouve plutôt joli. Pourtant, de moins en moins de personnes l’utilisent. Pourquoi se priver de quelque chose qui existe? Par exemple, beaucoup d’écrivains n’emploient plus le point d’exclamation. Il est banni. Moi-même, je l’emploie moins qu’il y a trente ans. Les points de suspension aussi sont en voie de disparition chez les écrivains car ils rappellent Céline.”
Parlez français !
Où est le bon sens à utiliser des anglicismes ou l’écriture inclusive quand on a tant de vocabulaire pour exprimer une pensée ou un sentiment? Bernard Pivot était en tout cas de ceux qui critiquaient ouvertement ces nouveaux usages de la langue française.
“Le français tel qu’on le parle aujourd’hui: ex-fan du click and collect pendant la Covid, iel booste le black friday pour s’acheter des must have avant la deadline.”
Visez la simplicité dans vos slogans
Bernard Pivot nous invite à créer des slogans brefs. Pour lui, la puissance d’un slogan tient en sa simplicité. Voici ce qu’il disait à propos du slogan “Je suis Charlie.”
“Ce slogan est fort car il est très simple: trois mots, on ne peut pas faire plus court. Un bon slogan doit être bref. Celui-ci est parlant, frappant, imagé. C’est une identification au malheur et à la fierté. Tout le monde le comprend, même les imbéciles. D’où la rapidité de sa propagation. Y compris dans les langues étrangères. La langue française est d’ailleurs très bonne dans le slogan. On l’a vu au moment des printemps arabes lorsque les peuples scandaient “Dégage”. le mot était en français dans les manifs.”
Vivez l’instant présent!
Bernard Pivot aimer demander aux auteurs leur mot préféré de la langue française. Au Journal du Dimanche, qui lui demandait lequel avait sa préférence, il avait répondu:
“C’est ‘aujourd’hui’. C’est le mot des journalistes. Nous ne sommes pas des historiens, nous ne sommes pas des ‘futurologues’, nous sommes des gens de l’actualité. ‘Aujourd’hui’ est pour moi le mot le plus important car il sent le café du matin, les croissants, le pain grillé. La matière sur laquelle nous travaillons, c’est la matière que nous fournit le ‘jour d’aujourd’hui’. Et puis, c’est un très joli mot, long avec au milieu…une apostrophe.”
Conjuguez au maximum au présent. Votre audience s’attend à ce que vous lui parliez du présent, ni du passé, ni du futur.